JAMES COTTON : "Giant" - Alligator Records (2010) 

A soixante-quinze ans, James Cotton a peut-être perdu l’essentiel de ses ressources vocales mais comme on a pu s’en rendre compte en juin dernier au Chicago Blues Festival 2010 où il joutait en grande forme avec le guitariste Matt Murphy, un autre géant du blues, il n’a rien perdu de ses talents d’harmoniciste. On comprend le souci de Bruce Iglauer de produire cet album marquant le retour de Cotton au bercail sur Alligator, après une longue absence et où, aux côtés de Noel Neal (bs) et Kenny Neal Jr. (dms), un chanteur a été adjoint à Cotton en la personne du guitariste Slam Allen, superbement encadré par l’harmonica de Cotton et dont le timbre de voix colle bien à la majorité du répertoire (Heard You’re Getting Married, Buried Alive In The Blues, Find Yourself Another Fool…), sauf dans le mauvais remake de How Blue Can You Get et dans une version minable de Since I Met You Baby (seuls Cotton et les guitaristes tirent leur épingle du jeu, à la Pyrrhus), l’autre guitariste, Tom Holland, chante lui aussi, sans trop d’éclat, sur une face (Sad Sad Day ) ; par contre, toutes les parties de guitare sont du top niveau. Beaucoup de reprises sur cet album (trois de Muddy Waters, une de Jimmy Rogers, de Nick Gravenites et de Ivory Joe Hunter, etc.) mais peu importe car ce qui compte ici c’est le festival d’harmonica déployé par un James Cotton qui assure ferme et tire des sons exquis  de son "Mississippi saxophone", tantôt en finesse (Sad Sad Day, Change, That’s Alright ), tantôt de manière tonitruante mais impériale (Let Yourself Go, Going Down Main Street , ou l’instrumental rapide With The Quickness). L’album se termine sur un deuxième instrumental qui est un vibrant hommage en medium à Koko Taylor, composé par Cotton lui même (Blues For Koko). Mr. Superharp, un géant en effet ! Recommandé.
http://www.alligator.com/     http://www.jamescottonsuperharp.com/#inx

: Robert SACRÉ
 


ROY GAINES AND HIS ORCHESTRA : "Tuxedo Blues" - Black Gold Records (2010)

Voilà une belle galette pétrie de swing dont vient nous régaler Mister Roy Gaines. En effet, il était difficile de trouver un titre plus approprié que ce Tuxedo Blues pour cet album qui nous fait faire un bond dans le passé, à l’époque où les big band de jazz étaient encore les rois du monde et faisaient swinguer la planète. Vibrant hommage à ses idoles de toujours, Count Basie, Duke Ellington, Jimmy Rushing, Joe Williams ou encore Nat King Cole, cet album du guitariste texan émule de T-Bone Walker et Gatemouth Brown à également un pied dans le présent puisqu’on y trouve une version instrumentale réarrangée swing du Rock With You de Michael Jackson ou encore une reprise du Miss Celie’s Blues, bande originale du film La Couleur Pourpre de Steven Spielberg. Il est à noter que la moitié des titres est due à la plume de Roy Gaines himself. L’ensemble sonne résolument "vintage" et rappelle la meilleur époque des grands labels de jazz. Pour ma part, le parallèle avec le Count Basie Orchestra période Joe Williams parait évident et l’atmosphère générale m’évoque aussi les faces Capitol de Lou Rawls. Tout est finement ciselé, la voix et la guitare de notre homme ont rarement été aussi bien mises en valeur et on retrouve quelques pointures, amis de longue date, en invités comme Joe Sample et Wilton Felder des légendaires Crusaders.
Roy Gaines a produit son disque seul, en dépit des difficultés financières, il a dû hypothéquer sa maison et sa voiture (je vous laisse découvrir les détails de l’histoire dans le livret très bien fait au demeurant) et a dirigé lui-même la section cuivre sur la moitié des titres. Un sacré morceaux de bravoure pour un gentleman de soixante-douze ans qui a encore beaucoup de choses à dire. 
http://www.myspace.com/roygaines

: Anthony STELMASZACK
 

 


JAMES KINDS : "Love You From The Top" - Delmark Records (2010)

Saluons le retour en piste d’un vétéran qui faisait partie, avec Billy Branch, Lurrie Bell, Johnny B. Moore et quelques autres de la New Generation of Chicago Blues dans les années soixante-dix et à qui on prédisait un avenir radieux. Mais en 1993, pour raisons familiales, il s’exila à Dubuque, Iowa, et même s’il fit dans cette région une belle carrière, sa notoriété ne dépassa pas les limites de cet état d’adoption. Pourtant, il refit surface, de façon très remarquée,  au Chicago Blues Festival en 2007 (voir ABS Magazine n°22) et sa carrière internationale fut relancée menant, deux ans après, à cet album bienvenu. Le prestigieux saxophoniste Eddie Shaw est  en guest efficace dans quatre titres. James Kinds a composé la totalité de l'album, donnant libre cours à sa passion pour les prénoms féminins (Peggy Sue, Katie, Johnny Mae, ces deux derniers titres avec Eddie Shaw), ses "amies" et connaissances (Crack Headed Woman, I Got A Woman, I Can’t Take It…) et pour un humour qui marque tous les lyrics de son empreinte et en particulier un I Didn’t Go Home ou les tribulations du gars qui a bu un coup de trop et ne peut pas ou n’ose pas rentrer chez lui. Sa voix gospélisante avec un vibrato plaisant, haut-perchée, comparable à celle de Jimmy Johnson (mais un brin moins assurée) ne le dessert pas, au contraire, et son jeu de guitare est tout aussi intéressant ; mis au service de mélodies proches de la soul et du rhythm'n'blues (Love You From The Top - avec Eddie Shaw - Oo Wee Baby ou un I Got A Woman qui ne doit rien à Ray Charles) et des blues intéressants comme les autobiographiques Mason Dixon Line Blues (dont la mélodie doit beaucoup au Cummins Prison Farm du regretté Calvin Leavy) et un poignant My Mama Told Me ; il y a encore d’autres blues en tempo medium (Peggy Sue, High Heel Shoes) ou fort bien enlevés comme Crack Headed Woman, Johnny Mae et Katie - avec Eddie Shaw - et comme aussi Body Slam et I Can’t Take It. Il y a même place pour une face de soul langoureuse (Take A Look At Yourself).
Bref, un retour en grande pompe qui augure bien d’apparitions multiples en clubs et en festivals, en Europe aussi…
http://www.delmark.com/     http://www.myspace.com/jameskindsandtheallnightriders

: Robert SACRÉ
 



MISSISSIPPI HEAT : "Let’s Live It Up !" - Delmark Records (2010)

Bob Koester et Delmark Records se sont résolument engagés dans la mise en lumière des meilleurs orchestres de blues traditionnels issus de la solide école de Chicago ; d’un côte des rééditions judicieuses (Willie Buck, Leric Records) de l’autre, les meilleurs groupes actuels en tête desquels Mississippi Heat qui d’album en album (le neuvième ici !) réussit toujours un effet de surprise épatant  par la qualité des compositions de Pierre Lacocque, par la solidité  et la qualité du groupe de base (Pierre, Inetta Visor, Kenny Smith, Stephen Howard), renforcé par des guests prestigieux ; dans l’album précédent Lurrie Bell, dans celui-ci les guitaristes John Primer (au chant aussi) et Carl Weathersby (quasiment membres à part entière désormais), une section cuivres de rêve avec les Chicago Horns (dont Bill McFarland, tb, et Sam Burckhardt, as, – longtemps partenaire attitré de Sunnyland Slim), mais encore Chris Cameron (B3 organ, p) et Rhonda Preston qui remplace Inetta quand celle-ci n’est pas disponible et qui chante ici Daggers And Spears avec un vibrato du plus bel effet. On n’insistera pas sur les talents d’harmoniciste de Pierre Lacocque, ils sont bien connus, sa dextérité au chromatique comme aux diatoniques est légendaire dans le milieu. Il est aussi un compositeur doué et prolifique qui signe ici encore, comme d’habitude, la plupart des morceaux (dix  sur treize) et surtout il se rappelle sans cesse que le blues est un style musical VOCAL par essence et de ce fait, sur  des mélodies les plus accrocheuses possibles, il colle des textes qui ont du sens, ainsi l’histoire  véridique de cette amie d’Inetta qui doit vivre dans un couple qui ne s’aime plus et en meurt (She Died From A Broken Heart) ou Peace Train aux accents gospélisants (avec un trio vocal, Kay Reed, Mae Koen et Vanessa Holmes), Jumpin’ In Chi-Town, sur un rythme endiablé (avec Inetta, le trio vocal, Carl Weathersby et la section de cuivres) et encore Steadfast, Loyal And True chanté par John Primer, comme Betty Sue (quelle  éclatante démonstration de guitare speedée puis d’harmonica et de piano, le tout sur un rythme d’enfer irrésistible) et I Got Some News Today et ainsi de suite. Tous les lyrics valent une écoute attentive, et comme les mélodies sont au diapason, le plaisir est total. Carl Weathersby est particulièrement au premier plan dans son rôle de Dr.Carl , (laissant son côté Mr.Carl pour ses albums solos avec son groupe perso) dans I Want To Know, Another Sleepless Night, Don’t Cry For Me (tous trois avec les Chi.Horns). Avec Mississippi Heat, Dr.Carl se fond parfaitement dans un contexte Chicago blues avec des fulgurances mélodiques de toute beauté et une subtilité alliée à une force d’expression sans pareille (Mr. Carl lui se laisse aller à ses affinités hendrixiennes avec ses longues tirades de guitare torturées dans les aigues mais rien de tout cela ici, rien que du Chicago blues du meilleur niveau).
Autant de talents rassemblés comme ici ne peut conduire qu’à un album d’exception, recommandé sans réserves.
http://www.delmark.com/     http://www.mississippiheat.net/

: Robert SACRÉ




STUDEBAKER JOHN’S MAXWELL STREET KINGS : "That’s The Way You Do"
Delmark Records (2010)

Encore des vétérans de la scène blues de Chicago qui refont surface, comme James Kinds. Studebaker John (Grimaldi) nous revient avec sa voix nasale, grasseyante et métallique mais percutante, un jeu d’harmonica plein et assuré (Son Of The Seventh Son, I’ll Always Be The Same) et un jeu de guitare assagi. Laissant son blues rock déjanté des débuts au vestiaire, il est ici centré sur son jeu de slide, et c’est très bien ainsi (So In Love With You ou A Fool Just Like Me avec un amusant rythme de marche au tambour), de plus, il signe les quinze morceaux de ce recueil. Ses partenaires ont de solides références : Rick Kreher a été le dernier guitariste de Muddy Waters et il est temps qu’on lui reconnaisse le talent qui est le sien, et Steve Cushing est un batteur qui a travaillé avec des "grands" du Chicago Blues (Billy Boy Arnold, Magic Slim, Big Smokey Smothers et plein d’autres) et qui a longtemps animé le très célèbre  show radio Blues Before Sunrise (www.bluesbeforesunrise.com). Il n’y a guère ou pas de déchet ici et d’autres faces sortent du lot comme les hypnotiques Fine Cadillac et When Your Mule Won’t Ride, l’hommage appuyé aux fastes révolus de Maxwell Street (Headin’ Down To Maxwell Street), le poignant slow blues If You Would Love Me, les deux faces instrumentales uptempo comme B-Line ou medium comme Taylor Street Boogie  (sur, à nouveau, un rythme de marche martelé par Steve Cushing ) comme d’autres faces rapides telles Shake It, à slow comme Steppin' Stone avec ses bons passages de slide.
Encore un  retour aux affaires réussi… à suivre.
http://www.delmark.com/     http://www.studebakerjohn.com/

: Robert SACRÉ
 

LENNY LAFARGUE ET LES MOUSTIQUES DB : "Je Ne Pense Qu’à Ça" - V.Music (2011)   

On ne présente plus Lenny Lafargue, l’Alligator du bayou bordelais, qui sévit depuis quelques décennies sur les scènes françaises. Chaque nouvel album de Lenny est une fête pour qui aime le blues chanté en français et les belles parties de guitare. Ce Je ne Pense Qu’à Ça n’échappe pas à la règle et dépasse même les espérances tant l’inspiration est au rendez-vous. Il y retrouve verve, ambiances et couleurs de son album fétiche, L’Estuaire, salué en son temps par l’ensemble de la presse spécialisée - ou pas.
Entouré de ses Moustiques Du Bayou nouvelle génération au groove et au shuffle impeccables - Aurélien Gody à la basse et Julien Bigey à la batterie -, Lenny laisse libre cours à son inspiration sur un répertoire aux saveurs diverses : blues (swamp : Adieu Ma Chérie Adieu ; country blues : Le Blues Le Dimanche ; Mississippi : l’hypnotique A Ras Du Sol ; etc.), boogie old school (Quidam Rock), boogaloo (Le Boogaloo) et rockin’ zydeco, rejoint par le swinguant Pascal Rosiak à l’accordéon (Les Flammes De L’Enfer).
Comme à son habitude Lenny Lafargue a soigné ses textes, marqués de son sceau. Si les femmes y sont très présentes - un festival printanier à l’humour décalé ! -, des thèmes plus sérieux du quotidien y sont abordés, tels les démons de l’alcool, la rupture, la société de consommation, la crise et, de fait, la peur du lendemain. Musicalement ses chorus de guitare, copieux, sont particulièrement lumineux, entre autre sur le slow blues Adieu Chérie Adieu. A noter deux courtes parties d’harmo jouées par Lenny himself (une première sur disque) ; magnifique en solo acoustique chant, guitare, ruine babines dans Le Blues Du Dimanche, aux accents de Candy Man, qui clôt l’album. Une réussite !


: Jean-Pierre SAVOUYAUD
   

 
LENNY LAFARGUE (Illustration : Sam Audrix)

 

SVEN ZETTERBERG : "Grounded In Reality" - Border Music (2010)

Né à Skärblacka le 28 mars 1952 (plus un tout jeune homme, mais il a de beaux restes !), c’est dès l’âge de sept ans que Sven Zetterberg commence par singer Elvis, le dieu de l’époque. Le premier artiste noir qu’il ait jamais vu fut Little Richard. Après la première écoute des Rolling Stones alors balbutiants, et surtout de Mick Jagger jouant des lamelles, il remonte aux racines et découvre Sonny Boy Williamson, qui lui donne le frisson idoine pour faire du blues son idiome de prédilection. Au départ surtout harmoniciste, il n’aborde sérieusement la guitare qu’en 1966. Il forme son premier groupe en 1972 et enregistre son premier album en 1976…
Soyons clairs : le Suédois Sven Zetterberg est - à mon humble goût - le meilleur artiste blues et soul européen actuel. Alors bien sûr, des guitaristes plus virtuoses sont légion. Des voix qui font autant frémir surgissent de n’importe quel pays du continent. De meilleurs harmonicistes existent, y compris en France (malheureusement Sven n’en joue aucune note sur ce disque). Le traitement d’un répertoire blues et soul peut être remarquable chez d’autres artistes hors USA. Mais force est de reconnaître que, plus on connaît Sven Zetterberg (et je ne le suis que depuis une petite dizaine d’années), plus on peut que l’apprécier… et, cerise sur le gâteau, son talent est aussi grand que sa connaissance de la musique qu’il perpétue.
Vous aimez Eli ''Paperboy''Reed, mais aussi Otis Rush ? La musique de Sven vous proposera un raccourci saisissant. Grounded In Reality, dernier joyau de l’artiste, est le chaînon manquant entre un irrésistible et chaud sustain de guitare et une blue-eyed soul simple mais richement vêtue de cuivres. On accueille donc avec une joie non dissimulée chaque nouvel album de ce génie de la mélodie…
En onze titres et seulement quarante-cinq minutes, l’homme emporte le morceau et vous crucifie sur place avec des chefs d’œuvre comme Your Heart Is Just A Frigidaire dans lequel le vibrato de la pleine caisse vous arrache des frissons de bonheur. L’homme manie aussi la slide : avec son ambiance moite à souhait, A Darker Side Of Me pourrait sortir d’un thriller vintage... Vous aimez les ballades à la Otis Redding et les chanteurs amoureux de Sam Cooke ? Vous serez servis avec The World I Live In ou A Memory From Happier Years, nostalgiques à outrance, avec chœurs, riffs de guitare pointus et soufflants cohésifs de rigueur. Comment ne pas user le dance-floor ?... Mais ne nous y trompons pas : Grounded In Reality signifie bien "ancré dans la réalité", et vivre musicalement dans le culte des années cinquante/soixante n’empêche nullement Sven Zetterberg d’aborder des thèmes certes récurrents, mais toujours actuels : les histoires d’amour, mais aussi l’introspection…
Ce disque, s’il n’atteint pas les sommets de Moving In The Right Direction (Last Buzz Records, 2004), demeure une excellente introduction à l’univers unique de ce Suédois absolument incontournable. On peut certes vivre sans connaître Sven Zetterberg. Mais moins bien.
http://www.svenzetterberg.com/

: Marc LOISON

 

THE LAMONT CRANSTON BAND : "Live At The People's Fair 1987" - Quiditty Records (2010)

J’ai pas mal d’affection pour ce groupe de ryhthm and blues et jump qui vient de Minneapolis et qui sortit d’excellents LPs. Je vous recommande particulièrement leur premier microsillon de 1975 et Special Lit (1977) avec des morceaux vraiment marquants tels l’instrumental Soul Flight, I Surrender et Excusez Moi, Mon Cheri, que reprirent les Blues Brothers. En 1994, un CD, Rock Awhile, compilait ces deux joyaux. Les deux albums suivants furent moins mémorable avant un fort réussi Shakedown en 1981, aux sonorités un peu plus rocks. La suite de leur carrière - une dizaine d’albums - est moins intéressante. Le groupe a toujours été étoffé, avec des vents. Il commença en septet avec notamment Pat Hayes (chant, harmo), Larry Hayes (guitare) et le clavier Bruce McCabe. Assez stable au début, le line-up finit par changer et en 1987 Pat Hayes était le seul encore présent parmi les six musiciens. À part sur deux ou trois disques, le Lamont Cranston Band n’a que peu composé, préférant les reprises. Il en va ainsi sur ce live où seul Upper Mississippi Shakedown - leur plus grand succès – me semble de leur plume. Sans atteindre la magie des premiers microsillons, le groupe est très bon sur les pièces rythmées. Les blues sont plus banals mais le Lamont Cranston Band est heureusement le plus souvent remuant, déployant une énergie contagieuse. Chorus d’harmonica, de guitare – elle sonne assez rock – de claviers et de sax alternent et on ne regrettera guère que les deux derniers instruments soient souvent trop en arrière question volume sonore. Voici un live qui est une bien bonne surprise. Et comme le disque est sous-titré The Bootleg Series : Volume 1, on peut en espérer d’autres…
http://www.myspace.com/lamontcranstonbluesband

: Luc BRUNOT
 

 

REVEREND K.M. WILLIAMS : "When I Rise" - Dialtone Records (2010)

Le sujet de la frontière entre gospel et blues fait débat depuis longtemps. Le révérend K.M. Williams ne simplifie pas les choses avec ce disque justement sans frontière entre les deux styles. Guitare à une corde jouée en slide, rythme marqué et souvent hypnotique, évocations non feintes de Howlin' Wolf, Elmore James (l'introduction de Dust My Broom est là et bien là !), R.L. Burnside, ou des maîtres du Delta, chant brut, harmonica, se mêlent aux appels et répons, aux chœurs et aux textes religieux, pour produire un mélange qui en fait le disque de l'année 2010. L'opposition entre la voix puissante, et en même temps plaintive, soumise à la volonté divine, du révérend et les chœurs maîtrisés, sensuels, presque soul, est l'équivalente des meilleurs sucrés-salés du monde culinaire. L'instant où, s'attendant à des chœurs, c'est l'harmonica lourd et bluesy qui prend le relais, est source de chair de poule. When I Rise, The Lord Will Work It Out Somehow, Something Took Control Of Me, We'll Go Back To God, autant de rythmes, rengaines, refrains, gimmick, qui vont coller à vous, vous faire chanter et danser. K.M. Williams n'est pas un nouveau venu, et ce disque n'est pas son premier. Mais il faut que ce soit celui de la révélation pour le plus grand nombre possible. 
http://www.dialtonerecords.com/

: Christophe MOUROT


 

  

DUKE ROBILLARD’S JUMPIN’ BLUES REVUE : Stomp ! The Blues Tonight – DixieFrog (2009)

On ne compte plus les productions de Duke Robillard, depuis ses premiers efforts avec le groupe Roomful Of Blues, il y a plus de trente-cinq ans, jusqu’à ses multiples collaborations avec quantité d’artistes, puis sa reconnaissance sans cesse grandissante en qualité de guitariste chanteur soliste.
Roomful Of Blues justement… Cet album est conçu comme un retour délectable mais sans nostalgie vers les temps glorieux où cette formation swinguante - dédiée au West Coast blues d’après guerre - enflammait les dancefloors revivalistes du nouveau monde avec sa section de cuivres surbookée. Duke Robillard consacre treize des seize titres de l'album à des reprises de standards jump blues de la période 1945-1955. Un répertoire dans lequel les scrutateurs zélés reconnaîtront des emprunts à Roy Milton, Lowell Fulsom, Johnny Watson, Helen Humes, Wynonie Harris, Paul Gayten et quelques autres, transposés dans la voix du Duke himself ou de la chanteuse Sunny Crownover. Quant aux originaux ils sont du même acabit : pas de bavardages inutiles, des chansons de trois/quatre minutes. Mister Robillard mène la danse sur son territoire de prédilection : courtes interventions vocales, solos de guitare fluides et acérés, et riffs de cuivres en sortie de mêlée. Pas de surprise ici, mais c’est jour de fête chez les clubbers !
http://www.dukerobillard.com/


: Dominique LAGARDE


                              
                                                                  
                                    JAY GAUNT : "Harmonicopia" - JBG Music (2010)

La déjà grande famille des harmonicistes s’est encore enrichie d’une unité avec Jay Gaunt. Son répertoire tourne essentiellement autour d’une soul funky instrumentale assez peu originale mais, face après face, il démontre une maestria assez spectaculaire à l’harmonica, tantôt  dans un registre subtil et introverti (Misty Muse, Greensleeves) tantôt de manière déclamatoire et affirmée (Double Shuffle). Cinq faces (sur douze) sont chantées par Victor Wainwright qui s’exprime dans un rock sudiste redneck un peu vulgaire à la Coco Robichaux qui ne fait pas honneur à Gaunt (Why Are People Like That, Louisiana Blues ), c’est subjectif évidemment  et c’est un peu  mieux dans quelques blues comme Home Of The Blues - un hommage appuyé à Memphis -, dans Devil Dealt The Blues et dans le Rattlesnake Shake (*) de Peter Green, où il exagère un peu moins son grasseyement malvenu et son vibrato, mais je trouve que ce chanteur fait de l’ombre à Gaunt qui méritait mieux que cela car il est vraiment un excellent harmoniciste. Par contre des guitaristes comme Skip Titts, Dave Cousar et Josh Roberts font de l’excellent travail, de même que les Royal Horns (Listen Here, Catnip) voire les New Memphis Strings (Midnight Rider).

(*) : avec , le croiriez vous, un washboard électrique !!
(Cody Dickinson)…  weird !
http://www.jaygaunt.com/

: Robert SACRÉ
                             

        

                                 MUD MORGANFIELD : "Fall Waters Fall" - Pops Daisy (2008)

Il y avait Big Bill, voici Mud, un autre des fils de Muddy Waters. Au contraire de John Lee Hooker Junior, les rejetons du maître de Chicago ne s'éloignent pas beaucoup du style paternel. Mud est même encore plus dans le moule que Big Bill. Accompagné notamment de Harmonica Hind et Rick Kreher, Mud fait dans l'orthodoxie chicagoanne, la ressemblance de sa voix avec celle de son père, encore plus poussée que celle de Big Bill, faisant parfois penser qu'on écoute là des faces posthumes. Orchestration impeccable, chant habité, textes souvent poignants, l'écoute est prenante de bout en bout. Il faut remarquer que, à l'instar de son demi-frère Big Bill, Mud sait varier les rythmes et éviter l'écueil du shuffle systématique. Le morceau-titre Fall Waters Fall est un blues lent dramatique comme on n'en a pas entendu depuis longtemps. En plus, Mud sait rendre intéressantes ses reprises du répertoire paternel. Muddy a eu de nombreux fils, légitimes ou hors mariage, on peut donc espérer encore une ou deux révélations !
http://www.myspace.com/muddywatersjr

: Christophe MOUROT

                                                                    


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